Les mesures conservatoires

Quand la situation est telle, qu’il est nécessaire pour le créancier d’agir immédiatement, faute de temps pour obtenir un titre exécutoire, ce dernier devra se prémunir contre l’insolvabilité de son débiteur en assurant la sauvegarde de ses droits.  

L’objectif est de permettre au créancier d’empêcher son débiteur de dissimuler tout ou partie de ses biens, il ne pourra donc plus donner, vendre ou encore détériorer les biens provisoirement saisis. L’avantage d’une telle mesure est avant tout son effet de surprise et l’effet immédiat attaché à l’indisponibilité du bien.

C’est pourquoi, le créancier a la possibilité d’obtenir du juge de l’exécution, l’autorisation de pratiquer des mesures conservatoires.

 

Il existe deux types de mesures conservatoires :

  • La saisie conservatoire : qui vise à rendre indisponible un bien ou une créance dans le patrimoine du débiteur
  • La sureté judiciaire : qui vise à conférer au créancier un droit sur la valeur du bien ou de la créance grevée.

 

S’il est fait droit à la demande du créancier, la mesure conservatoire sera alors convertie en mesure définitive. Dans le cas contraire, la mesure conservatoire prendra alors fin.

Les conditions d’application :

L511-1 CPCE : « Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement. La mesure conservatoire prend la forme d’une saisie conservatoire ou d’une sûreté judiciaire. »

  • Une créance paraissant fondée en son principe 
  • Une créance menacée dans son recouvrement 

Une créance paraissant fondée dans son principe :

  • Nature de la créance : Il est indifférent que la créance soit de nature civile, commerciale, contractuelle ou encore délictuelle.
  • L’objet de la créance : Bien que la créance dont se prévaut le créancier porte en principe sur le paiement d’une somme d’argent, il est possible que la créance consiste en une restitution ou la délivrance d’un bien.
  • La certitude de la créance : Il n’est pas nécessaire que la créance soit certaine pour que la mesure conservatoire soit autorisée. Il suffira simplement d’établir la vraisemblance de la créance.
  • Liquidité de la créance : Il n’est pas nécessaire de justifier du caractère liquide de la créance.
  • Exigibilité de la créance : Il n’est là encore pas nécessaire que la créance soit exigible.

 

Des circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance invoquée :

Le créancier doit rapporter la preuve du péril menaçant sa créance, le simple refus du débiteur de s’exécuter n’est pas de nature à caractériser un péril. Il devra donc réussir à démontrer le risque d’insolvabilité du débiteur et la menace de sa créance par les agissements du débiteur.  

Le juge dispose quant à lui d’un pouvoir souverain d’appréciation.

Procédure :


Le principe : L’autorisation du juge :

Lorsqu’un créancier souhaite mettre en œuvre des mesures conservatoires, il devra solliciter l’autorisation du juge, sous réserve du cas ou il est en possession d’un titre exécutoire.


Compétence :

  • Compétence matérielle :
    • Le juge de l’exécution dispose de la compétence de principe
    • Le président du tribunal de commerce
  • Compétence territoriale :
    • Le juge du lieu ou demeure le débiteur
    • Lorsque le débiteur réside à l’étranger ou que le lieu ou il demeure est inconnu, le juge de l’exécution compétent sera celui du lieu d’exécution de la mesure.

 

L’auteur de la demande

Le créancier ou son représentant légal dispose de la faculté de se défendre lui-même ou de se faire assister ou représenter.

Forme de la demande :

  • Présentation d’une requête :

Le juge compétent pour connaître de l’adoption de mesures conservatoires doit être saisi par voie de requête :

•   Elle doit être présentée en double exemplaire ;
•   Elle doit être motivée, le créancier devra donc démontrer :
- l’existence d’une créance fondée en son principe
- une menace pour le recouvrement de sa créance ;
•  Elle doit comporter l’indication des pièces invoquées ;
•  Si elle est présentée à l’occasion d’une instance, elle doit indiquer la juridiction saisie

  • Les mentions obligatoires :

La requête contient à peine de nullité :

  • Pour les personnes physiques : nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur
  • Pour les personnes morales : forme, dénomination, siège social, et organe qui les représente légalement
  • Indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée s’il s’agit d’une personne physique, ou sa dénomination et son siège social s’il s’agit d’une personne morale
  • Indication de l’objet de la demande.

 

La décision du juge :
  • Les possibilités du juge :
•  Accéder à la demande du créancier 
- Il rend alors une ordonnance qui sera exécutoire au seul vu de la minute, le créancier agira ainsi à ses risques et périls
•  Débouter le créancier de ses prétentions 
- le créancier pourra interjeter appel dans un délai de 15 jours à compter de la date du prononcé de l’ordonnance
- sauf si l’ordonnance a été rendue par le Premier Président de la Cour d’appel
•  Réexaminer sa décision afin de provoquer un débat contradictoire

La mesure conservatoire autorisée, doit être exécutée dans un délai de 3 mois à compter de l’ordonnance, à défaut l’autorisation devient caduque.

Toutefois, le créancier disposera de la faculté de formuler une nouvelle demande.

L’exception : la dispense de demande d’autorisation :

Il existe plusieurs cas dans lesquels le créancier est dispensé de solliciter l’autorisation du juge pour pratiquer une mesure conservatoire :

• Le créancier est en possession d’un titre exécutoire : L111-3 CPCE
• Le créancier est en possession d’une décision de justice qui n’a pas encore force exécutoire
- Décisions qui ne sont pas passées en force de chose jugée
- Décisions qui sont assorties d’un délai de grâce

• Le créancier est porteur d’une lettre de change acceptée, d’un billet à ordre ou d’un chèque
• Le créancier est titulaire d’une créance de loyer impayé


 La mise en œuvre des mesures conservatoires :



• L’huissier mandaté par le créancier doit dans un premier temps procéder à la réalisation de l’acte de saisie ou à l’accomplissement des formalités d’inscription de la sureté.

La mesure conservatoire doit être exécutée dans un délai de 3 mois à compter de l’ordonnance, à défaut celle-ci sera frappée de caducité.

• Dès lors que le mesure conservatoire n’est pas effectuée entre les mains du débiteur, mais entre celles d’un tiers, elle devra être dénoncée au débiteur dans un délai de 8 jours. A contrario, la mesure accomplie directement entre ses mains n’aura pas à lui être dénoncée.

• Le créancier dispose du délai d’un mois suivant l’exécution de la mesure pour accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire.

Lorsque la mesure est pratiquée entre les mains d’un tiers, le créancier devra lui signifier une copie des actes attestant les diligences entreprises dans un délai de 8 jours à compter de leur date.

• Dès l’obtention du titre exécutoire ou une fois que la décision du créancier soit passée en force de chose jugée, la mesure conservatoire doit être convertie en mesure d’exécution forcée ou en sureté définitive :

- S’agissant des saisies conservatoires :

  • Une fois le titre exécutoire obtenu, l’acte de conversion doit être signifié au tiers saisi et dénoncé au débiteur
  • Il n’est pas nécessaire que la décision soit passée en force de chose jugée dès lors qu’elle est assortie de l’exécution provisoire

- S’agissant des suretés judiciaires :

  • Une fois que le créancier obtient une décision passée en force de chose jugée, doit être opérée une publicité définitive propre à chaque sureté auprès de l’organe ayant reçu la publicité provisoire.
  • La publicité définitive doit être effectuée dans un délai de deux mois.

 

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